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L’Agenda 2030 en France
Le site des objectifs de développement durable (ODD)
Publié le 16 juillet 2025
À l’International Lutter contre les inégalités et la pauvreté et assurer la solidarité et la cohésion sociale Appropriation et mise en œuvre des ODD
Le forum politique de haut niveau sur le développement durable, placé sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC), a tenu sa deuxième journée de travail marquée par deux débats. Le premier, en matinée, était consacré aux interactions entre l’ensemble des Objectifs de développement durable (ODD) et le cinquième d’entre eux dédié à l’égalité des sexes. Dans l’après-midi, les représentants d’États Membres, d’organisations internationales, d’ONG et des milieux d’affaires et universitaires ont débattu de l’accélération de la mise en œuvre des ODD dans les pays en situation particulière.
À l’occasion de la deuxième journée du HLPF 2025, les discussions ont porté principalement sur l’égalité entre les sexes, alors que les délégués ont évalué les progrès accomplis dans la mise en œuvre de l’Objectif de développement durable 5.
Jan Beagle , directrice général de l’Organisation internationale de droit du développement (OIDD
Quels partenariats efficaces peuvent être forgés pour accélérer la mise en œuvre des ODD tenant compte de la dimension de genre? C’est la question centrale qu’a posée aux panélistes la modératrice de ce débat, Mme Jan Beagle, Directrice générale de l’Organisation internationale de droit du développement, en mettant l’accent sur la justice en faveur des femmes, notamment celles victimes de violence.
Bob Rae , président de l’ECOSOC
Les intervenants à la discussion ont été d’accord pour dire que sans progrès en matière d’égalité des sexes, la réalisation de l’ensemble des ODD est menacée. Le Président de l’ECOSOC, M. Bob Rae, a confirmé que l’ODD 5 doit être considéré comme un catalyseur : il est crucial pour réaliser tous les autres objectifs.
La Directrice exécutive d’ONU-Femmes, Mme Sima Sami Bahous a reconnu que « si nous continuons au rythme actuel, la véritable égalité des sexes dans la vie économique, dans le leadership, en matière de sécurité, ne sera pas atteinte avant des générations ».
Sima Sami Bahous , Directrice exécutive d’ONU Femmes
C’est inacceptable, a t-elle indiqué avant d’appeler à passer d’efforts fragmentés à des approches pangouvernementales et pansociétales. En effet, a-t-elle argumenté, l’égalité des sexes ne peut pas être l’apanage d’un seul ministère ou d’un seul acteur. Elle a recommandé, si l’on veut aller de l’avant en dépit des contrecourants, d’investir dans les organisations dirigées par des femmes et des jeunes et de lutter contre la désinformation. Elle a aussi suggéré de développer de solides systèmes de données sur le genre qui permettent de suivre l’impact réel des mesures prises et de s’attaquer aux inégalités croisées.
« Veillons à ce que les femmes aient une place à la table et investissons dans la santé sexuelle », a suggéré pour sa part la Finlande, tandis que la Norvège a fait remarquer que l’égalité commence à la maison. L’Uruguay a proposé à cet égard de changer la donne qui veut que les femmes prennent en charge les deux tiers des tâches ménagères. La Chine a témoigné quant à elle de la place que prend l’égalité des sexes dans son pays : ce n’est pas une option, mais une obligation pour une société qui a résolument opté pour l’égalité.
Des pratiques préjudiciables portant gravement atteinte aux droits fondamentaux des femmes et des filles persistent
Le manque de progrès dans l’égalité des sexes a cependant marqué les débats. Par exemple, l’Ambassadrice de la jeunesse pour She Loves Tech, Mme Zara Khanna, a révélé que moins du tiers des ingénieurs au monde sont des femmes. Elle a donc suggéré de changer cet état des lieux en mettant en place des programmes de mentorship entre femmes dans les domaines scientifiques.
De son côté, le responsable des données et des analyses chez Equal Measures 2030, M. Albert Motivans, a misé sur les données en appelant à renforcer l’utilisation des données nationales et mondiales sur le genre, telles que celles de l’Indice de genre des ODD et les travaux menés par l’ONU. Il a conseillé de promouvoir le « féminisme des données » afin de combler les lacunes en matière de données sensibles au genre. Cela permettrait de surveiller les lois et les politiques et d’éclairer les décisions des décideurs politiques, a-t-il indiqué.
L’égalité des genres permet aussi des avancées en matière de paix et de sécurité. Comme l’a dit l’Irlande, en effet, les accords de paix incluant les femmes ont plus de chance d’être mis en œuvre. Le Rwanda a aussi tenu à préciser que l’égalité entre les sexes n’est pas le problème des femmes ; c’est une question de justice et de développement. C’est d’ailleurs pour cette raison que le Népal a mis en place un budget qui tient compte des besoins des femmes.
Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) a appelé, pour sa part, à investir davantage dans l’éducation des filles et des femmes. Une approche déjà suivie par la Thaïlande dont la politique d’éducation gratuite pendant 15 années a contribué à une hausse des taux d’achèvement des études chez les filles et à une augmentation du taux d’alphabétisation des femmes, qui a atteint 94,6% en 2022.
Les observateurs saluent la déclaration selon laquelle la corruption doit être combattue et les droits des LGBTQ mieux reconnus
Le groupe LGBTQI a quant à lui dénoncé le fait que 64 pays continuent de pénaliser les relations consensuelles entre personnes du même sexe et que de nombreux gouvernements ne reconnaissent que deux genres. Sa conclusion est qu’il ne sera pas possible d’atteindre les ODD si les besoins des LGBTQI ne sont pas pris en compte. La Fédération de Russie a toutefois fait remarquer que l’on risque de voir les femmes et les enfants « invisibilisés » en utilisant le terme genre « à tort et à travers » dans les enseignes internationales pour désigner en fait « les sexes ».
Trop souvent, les efforts de développement de la communauté internationale traitent l’égalité des sexes principalement comme une question d’autonomie individuelle, détachée des relations et des responsabilités, a aussi fait observer le Saint-Siège. Cet État observateur a jugé crucial de mettre l’accent sur la compréhension relationnelle de la personne humaine, de valoriser la complémentarité des femmes et des hommes et d’affirmer que la famille est le lieu de relations. Ainsi, des politiques de soutien et de protection des familles et de la maternité doivent être mises en œuvre, parallèlement à la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, a plaidé le Vatican.
Pour que ces transformations voulues soient durables, un financement adéquat est nécessaire, a avancé le Chili. Le pays a appelé à faire preuve de volonté politique, accompagnée des budgets adéquats et d’une fiscalité progressive, en utilisant de données ventilées et des mécanismes de responsabilisation.
Accélérer la mise en œuvre des ODD dans les pays en situation particulière Lors de cette seconde table ronde de la journée, le forum s’est intéressé à la réalisation des ODD dans les pays africains et les pays en situation particulière, tels que les pays les moins avancés (PMA) et les pays en développement sans littoral (PDSL). Les pays à revenu intermédiaire (PRI) ont fait l’objet d’un traitement à part.
« Seuls 15% des ODD ont été réalisés ; 75% du temps est déjà écoulé ; des milliards ont été dépensés. Peut-être devrions-nous nous interroger sur nos modes d’exécution et nos partenariats. Peut-être que tout doit être repensé », a suggéré Cristina Duarte, Secrétaire générale adjointe et Conseillère spéciale des Nations unies pour l’Afrique, en lançant la discussion, avant d’annoncer placer ses espoirs dans l’actuelle réforme insufflée par le Secrétariat, l’Initiative ONU80, pour changer de méthode.
Cristina Duarte , Secrétaire générale adjointe et Conseillère spéciale des Nations Unies pour l’Afrique
Ces groupes de pays sont chacun confrontés à des défis uniques. Pour les PDSL par exemple, l’amélioration des infrastructures et de la connectivité est cruciale pour surmonter leurs barrières géographiques et faciliter les échanges commerciaux, selon Mme Rabab Fatima, Secrétaire générale adjointe et Haute-Représentante pour les PMA et les PDSL. Elle a cité un nouveau Programme d’action pour la connectivité des PDSL, qui encourage l’agriculture intelligente, le commerce électronique et les solutions numériques en termes de santé, dans la droite ligne du Programme 2030 et du Programme d’action de Doha.
Rabab Fatima , Secrétaire générale adjointe et Haute Représentante pour les PMA, les PDSL et les PEID, et Secrétaire générale de la troisième Conférence des Nations Unies sur les PDSL (LLDC3), salue Landry Signé , Brookings Institution
Mais pourquoi un tel manque d’investissement dans ces groupes de pays, et comment faire voler en éclat les goulots d’étranglement? Selon M. Landry Signé, chargé de recherche à l’Institut Brookings, le plus important est de combler l’écart entre les « excellentes intentions en matière de politiques » et la réalité souvent décevante de leurs mises en œuvre. Il faudrait aussi prendre en compte « les cadres d’ambiguïté conflictuelle » des politiques, à savoir que les parties prenantes, trop souvent en conflit entre elles, tirent à hue et à dia.
Landry Signé , Établissement Brookings
Enfin, le rôle économique du secteur privé va beaucoup grossir en Afrique, et ce dernier doit être davantage impliqué dans les prises de décisions : M. Signé a appelé à « donner un coup de fouet aux échanges, aux aides à l’investissement et à l’entrepreneuriat des femmes », que l’on n’aide pas assez en Afrique, alors qu’elles supplantent les hommes dans le domaine de la création d’entreprises.
Pour le Zimbabwe qui, en tant que PMA africain sans littoral, cumule tous les particularismes évoqués, la mise à disposition de moyens de mise en œuvre adéquats est essentielle, comme l’Engagement de Séville, récemment adopté, l’a d’ailleurs reconnu.
Le Zimbabwe a insisté sur la charge de la dette, qui limite sa marge de manœuvre budgétaire pour investir dans des services sociaux essentiels et le contraint, comme beaucoup d’autres pays africains, à allouer davantage de ressources au service de la dette qu’à des projets de développement transformateurs. Cette crise de la dette est aggravée par le poids de ce que le Zimbabwe nomme « la prime de risque africaine », qui soumet les pays africains à des coûts d’emprunt plus élevés que ceux d’autres pays en développement bénéficiant de notes de crédit comparables. Le pays d’Afrique australe a donc appelé les agences de notation à « réviser et affiner » leur méthodologie d’évaluation.
Les conflits armés atteignent aujourd’hui leur plus haut niveau depuis la fin de la guerre froide, contribuant à une fragilité accrue dans de nombreuses régions d’Afrique, a aussi commenté le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), qui soutient 8 pays, dont 6 en Afrique, qui se sont engagés à soutenir 11,7 millions de personnes déplacées. La planification de solutions à la situation des personnes déplacées de force doit être intégrée aux stratégies nationales et aux cadres de financement public, a plaidé le HCR, qui a appelé à un effort soutenu pour passer de l’aide humanitaire stricto sensu à une véritable politique de développement.
L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a mis en avant plusieurs initiatives d’envergure s’agissant de soutenir ces pays dans l’accélération de leur développement socioéconomique, grâce aux utilisations pacifiques des sciences et technologies nucléaires. L’agence onusienne travaille en étroite collaboration avec les pays africains, les PMA et les PDSL dans des secteurs clefs, tels que la sécurité alimentaire et l’agriculture durable. Par exemple, grâce à des techniques nucléaires et isotopiques, l’AIEA aide les agriculteurs à accroître la résilience des cultures, à optimiser l’utilisation de l’eau et à lutter contre les ravageurs qui menacent la production alimentaire, comme la chenille légionnaire d’automne et la mouche tsé-tsé. Et grâce à une technique appelée « sélection par mutation végétale », les agriculteurs du Burundi, de la République centrafricaine, du Rwanda et du Zimbabwe ont doublé ou triplé leurs rendements de manioc.
Ailleurs dans le monde, l’AIEA collabore avec des scientifiques des Andes et de l’Himalaya pour collecter des données sur les glaciers afin de prévoir les effets en cascade de la fonte des glaces sur les écosystèmes. Cela peut aider les communautés locales à s’adapter et à gérer efficacement leurs ressources en eau douce. L’AIEA soutient enfin la planification énergétique, notamment les études de faisabilité pour l’énergie nucléaire et les petits réacteurs modulaires (PRM), afin de fournir aux populations une électricité pilotable et décarbonée.
Le développement de l’intelligence artificielle (IA) et des technologies émergentes sont aussi extrêmement importantes pour le développement socioéconomique, puisqu’elles pourraient « doubler le PIB des pays africains d’ici à 2035 », d’après une étude citée par M. Signé, de l’Institut Brookings. L’universitaire a appelé à tirer parti du « capital humain » pour absorber les capacités de l’IA. Il a appelé à appliquer « une gouvernance souple » à leur égard.
Un pays bailleur de fonds comme la Norvège a mis en avant son aide aux pays africains en matière de sécurité, de multilatéralisme et de défense de l’environnement ; elle les a appelés à renforcer leur gouvernance et la solidité de leurs institutions. L’Allemagne a, pour sa part, affirmé que la communauté internationale a besoin d’une « voix africaine forte » dans les forums multilatéraux. L’inclusion de l’Union africaine au G20 et la présidence du G20 assumée par l’Afrique du Sud sont des étapes importantes et nécessaires en ce sens et d’autres étapes doivent suivre, a-t-elle plaidé, avant d’encourager à renforcer le rôle et la responsabilité du secteur privé dans les nouvelles alliances pour le développement durable.
Plus de la moitié des pays du monde sont classés comme pays à revenu intermédiaire (PRI). Ils regroupent environ 75% de la population mondiale et représentaient, en 2024, plus de 57% du PIB mondial. Le Bureau de l’ECOSOC rappelle dans sa note de cadrage que ces pays ne parviennent pas à surmonter le « piège du revenu intermédiaire ».
Paradoxalement, ont expliqué les panélistes, les PRI concentrent plus de 62% de la population mondiale vivant dans l’extrême pauvreté, révélant une hétérogénéité structurelle que les systèmes de classification actuels ne parviennent pas à saisir correctement. Historiquement, les PRI ont eu du mal à maintenir une croissance du produit intérieur brut par habitant suffisante pour élever le niveau de vie à celui des pays développés. Leur transition nécessite des investissements importants, tant publics que privés, mais la marge de manœuvre budgétaire des PRI est limitée par des coûts d’accès élevés aux marchés financiers internationaux et un accès restreint aux financements concessionnels, justement en raison de leur statut de PRI.
Le Costa Rica se satisfait ainsi bien mal de cette « catégorisation binaire », qui selon lui crée d’importantes distorsions dans l’allocation des ressources internationales. Le « piège du revenu intermédiaire », formule qu’il a repris à son compte, est exacerbé par des « critères obsolètes » qui limitent aussi son accès aux financements concessionnels et aux mécanismes multilatéraux pour le climat. Le Costa Rica a donc jugé urgent de mettre en œuvre une « taxonomie multidimensionnelle du développement » qui inclurait, au-delà du PIB par habitant, des indicateurs de vulnérabilité, de viabilité budgétaire et de capacités institutionnelles.
Antonio Manuel R. Lagdameo , Représentant permanent des Philippines auprès de l’ONU
Au nom d’un groupe représentant les pays à revenus intermédiaire (PRI), les Philippines ont rappelé que lors de la Conférence de haut niveau des PRI tenue à Manille en avril et à travers son document final, la Déclaration de Makati sur les pays à revenu intermédiaire, les PRI ont identifié des priorités stratégiques pour tracer leur chemin vers la transition. Une importance particulière est ainsi donnée au financement du développement, à l’utilisation de critères allant au-delà du simple revenu intérieur brut pour classer les pays ; à la viabilité de la dette ; à l’action et au financement climatiques ; ainsi qu’à la transformation numérique, entre autres.
Pays bailleur, l’Allemagne a reconnu le « rôle central » joué par les PRI dans la résolution des défis mondiaux. À cette fin, l’Allemagne a dit s’associer à 46 des 104 PRI par le biais de la coopération bilatérale au développement. Elle a cité en exemple la coopération triangulaire sur la production de noix de cajou, qui a facilité l’échange de connaissances entre le Ghana, le Brésil et l’Allemagne sur une productivité efficace et de haute qualité, améliorant ainsi les revenus, la sécurité alimentaire et la résilience climatique des agriculteurs des deux régions.
Bilan des droits des femmes, 30 ans après la Conférence de Pékin".
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