Journal de bord du Forum politique de haut niveau 2025 - Jour 3

Alors que le Forum politique de haut niveau sur le développement durable entre dans sa troisième journée, les discussions se sont intensifiées autour de trois enjeux majeurs : la consommation et la production durables, l’emploi décent et les stratégies de résilience des petits États insulaires en développement. Entre défis structurels, propositions concrètes et témoignages de terrain, les participants ont dressé un état des lieux préoccupant mais porteur de solutions pour accélérer la mise en œuvre du Programme 2030.

Pour cette troisième journée du FPHN, l'attention s'est portée sur l'ODD 8 - travail décent et croissance économique
Pour cette troisième journée du FPHN, l'attention s'est portée sur l'ODD 8 - travail décent et croissance économique - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3131

Pour cette troisième journée du FPHN, l’attention s’est portée sur l’ODD 8 - travail décent et croissance économique

Au troisième jour du forum politique de haut niveau (#HLPF) sur le développement durable, placé sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC), les délégations ont commencé par prendre connaissance du rapport d’activité annuel du Cadre décennal de programmation concernant les modes de consommation et de production durables (The 10-Year Framework of Programmes on
Sustainable Consumption and Production-10YFP).

Les délégués se réunissent pour entendre le rapport sur le Cadre décennal de programmes sur les modes de consommation et de production durables (10YFP)
Les délégués se réunissent pour entendre le rapport sur le Cadre décennal de programmes sur les modes de consommation et de production durables (10YFP) - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3129

Les délégués se réunissent pour entendre le rapport sur le Cadre décennal de programmes sur les modes de consommation et de production durables (10YFP)

Le Cadre décennal, établi dans le document final de la Conférence Rio+20, demeure le seul mécanisme de mise en œuvre mandaté par l’ONU pour garantir une consommation et une production durables, un objectif qui constitue un pilier du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Le rapport a été présenté par Mme Annika Lindblom, Directrice des affaires internationales et européennes au Ministère de l’environnement de la Finlande, qui copréside le Conseil d’administration du Cadre décennal. Pour avancer dans la mise en œuvre du Programme 2030, il faut absolument assurer une consommation responsable, a-t-elle noté.

Annika Lindblom , ministère de l'Environnement, Finlande, et coprésidente du conseil d'administration du 10YFP
Annika Lindblom , ministère de l'Environnement, Finlande, et coprésidente du conseil d'administration du 10YFP - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3128

Annika Lindblom , ministère de l’Environnement, Finlande, et coprésidente du conseil d’administration du 10YFP

Le rapport, cette année, propose quatre solutions évolutives et fondées sur des données probantes, approuvées dans le Cadre 10YFP 2025-2026. La première est d’effectuer des « achats publics durables ». Selon le rapport, ces achats qui représentent jusqu’à 20% du PIB mondial, restent sous-exploités, alors que l’alignement des marchés publics sur les objectifs climatiques et de circularité peut réduire considérablement les émissions, les déchets et les coûts dans des secteurs comme la construction et l’alimentation.

Deuxièmement, il est nécessaire de combler les principales lacunes en matière de responsabilité et de politique qui entravent actuellement le déploiement de la circularité dans le secteur privé. Les approches circulaires peuvent entraîner des réductions annuelles de 5% de la consommation de matériaux, de 12% de la pollution atmosphérique et de 2% de l’occupation des terres arables d’ici à 2050, a précisé Mme Lindblom.

En 2024, 58 % de la main-d'œuvre mondiale exerçait un emploi informel. Le chômage des jeunes demeurait particulièrement élevé, atteignant 12,9 %, soit trois fois le taux observé chez les adultes.
En 2024, 58 % de la main-d’œuvre mondiale exerçait un emploi informel. Le chômage des jeunes demeurait particulièrement élevé, atteignant 12,9 %, soit trois fois le taux observé chez les adultes. - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3130

En 2024, 58 % de la main-d’œuvre mondiale exerçait un emploi informel.
Le chômage des jeunes demeurait particulièrement élevé, atteignant 12,9 %, soit trois fois le taux observé chez les adultes.

La troisième solution consiste à améliorer l’employabilité des jeunes. L’Organisation internationale du Travail (OIT) prévoit que l’économie circulaire pourrait créer jusqu’à 8 millions d’emplois nets d’ici à 2030. Cependant, les systèmes éducatifs n’ont pas encore rattrapé leur retard et risquent de laisser une génération de jeunes sans les compétences et les connaissances écologiques nécessaires pour l’avenir.

Enfin, la quatrième solution proposée est l’intégration et la mise en œuvre de la production et consommation durables et de l’économie circulaire par les pays. Mme Lindblom a, de ce fait, appelé tous les États Membres à rendre compte au Secrétariat du Programme-Cadre décennal de leurs efforts et de contribuer à combler les écarts.

Les participants au forum politique de haut niveau ont ensuite tenu deux tables rondes, celle du matin portant sur l’ODD 8 relatif à l’emploi décent et à la croissance économique, celle de l’après-midi visant à étudier les stratégies de développement des petits États insulaires en développement, qu’on appelle les PEID.

Objectif de développement durable 8 sur le travail décent et liens avec les autres ODD

Lok Bahadur Thapa , vice-président de l'ECOSOC, convoque les discussions sur l'ODD 8 - travail décent et croissance économique
Lok Bahadur Thapa , vice-président de l'ECOSOC, convoque les discussions sur l'ODD 8 - travail décent et croissance économique - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3132

Lok Bahadur Thapa , vice-président de l’ECOSOC, convoque les discussions sur l’ODD 8 - travail décent et croissance économique

L’ODD 8 sur le travail décent est parmi les moins enclins à être réalisés à l’horizon 2030, a d’entrée de jeu averti le Vice-Président de l’ECOSOC, M. Lok Bahadur Thapa (Népal). Pourtant, le travail sur ce sujet est primordial si l’on veut réaliser le Programme 2030 et réduire les inégalités, a souligné le modérateur de la discussion, M. Sangheon Lee, qui est Directeur du Département politiques de l’emploi, création d’emplois et moyens de subsistance à l’Organisation internationale du Travail (OIT).

Jason Judd , directeur exécutif, Global Labour Institute, Université Cornell
Jason Judd , directeur exécutif, Global Labour Institute, Université Cornell - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3121

Jason Judd , directeur exécutif, Global Labour Institute, Université Cornell

Le Directeur exécutif de Global Labour Institute de Cornell University, M. Jason Judd, a commencé par rappelé l’effet négatif des chaleurs extrêmes et des inondations intenses sur les travailleurs et la production. Il a dès lors appelé à modifier la législation afin de tenir compte de la santé des travailleurs dont certains, dans le secteur du textile par exemple, sont exposés à des températures très élevées. Le chercheur a conseillé d’évaluer le niveau de conformité du droit national aux droits des travailleurs, notamment par rapport aux normes de l’OIT.

Patrick Paul Walsh , professeur d'affaires mondiales et d'avenir durable, University College Dublin (UCD), vice-président de l'éducation, Réseau des solutions pour le développement durable des Nations Unies (SDSN)
Patrick Paul Walsh , professeur d'affaires mondiales et d'avenir durable, University College Dublin (UCD), vice-président de l'éducation, Réseau des solutions pour le développement durable des Nations Unies (SDSN) - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3125

Patrick Paul Walsh , professeur d’affaires mondiales et d’avenir durable, University College Dublin (UCD), vice-président de l’éducation, Réseau des solutions pour le développement durable des Nations Unies (SDSN)

En plus de leurs droits, il faut prêter attention à la formation des travailleurs, a enchaîné M. Patrick Paul Walsh, professeur de l’Université de Dublin qui exerce également la fonction de Vice-Président de l’éducation au Réseau des solutions pour le développement durable. D’où son appel à établir des partenariats entre les gouvernements, les établissements d’enseignement et les entreprises au sein des chaînes de valeurs mondiales, afin d’exploiter une révolution numérique capable de produire des biens et des services ayant des retombées positives. Il faut investir dans des personnes possédant des compétences numériques et écologiques, a précisé le professeur avant d’appeler les gouvernements à collaborer avec les universités et les établissements d’enseignement et de formation professionnelle pour proposer des micro-certifications dans toutes les régions du monde. Il a cité l’exemple d’un cours en ligne ouvert sur l’assurance et les ODD, en partenariat avec le Better Insurance Network et l’Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche (UNITAR).

Rola Dashti , Secrétaire exécutive, Commission économique et sociale des Nations Unies pour l'Asie occidentale (CESAO)
Rola Dashti , Secrétaire exécutive, Commission économique et sociale des Nations Unies pour l'Asie occidentale (CESAO) - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3122

Rola Dashti , Secrétaire exécutive, Commission économique et sociale des Nations Unies pour l’Asie occidentale (CESAO)

Autres conditions essentielles au travail décent et à la croissance économique : la paix et la stabilité. La Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO) a mis en garde qu’aucun des ODD ne pourra être atteint sans cela. Dans sa région, le chômage des jeunes atteint 26%, tandis que celui des jeunes femmes est de 42%, soit le taux le plus élevé au monde, a noté Mme Rola Dashti. Elle a aussi rappelé que près de 60% des travailleurs en Asie occidentale évoluent dans l’économie informelle. Mme Dashti a plaidé pour que les travailleurs informels et les travailleurs indépendants bénéficient d’une protection sociale en demandant d’investir dans l’économie du soin et les réformes juridiques nécessaires pour libérer le plein potentiel économique des femmes.

Un autre impératif dans la région est l’inclusion financière, a ajouté la Secrétaire exécutive étant donné que 64% des adultes y sont non bancarisés. De manière générale, elle a prôné un réalignement des politiques, des institutions et des priorités d’investissement autour des personnes, au lieu de ne viser que le profit. Elle a précisé que le travail décent n’est pas un sous-produit de la croissance. C’est un choix politique délibéré qui nécessite une action coordonnée, un engagement politique soutenu et un alignement clair des priorités économiques sur les résultats sociaux.

Macarena Letelier , directrice générale, Confédération de la production et du commerce du Chili, et Siobhan Vipond , vice-présidente, Congrès du travail du Canada
Macarena Letelier , directrice générale, Confédération de la production et du commerce du Chili, et Siobhan Vipond , vice-présidente, Congrès du travail du Canada - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3120

Macarena Letelier , directrice générale, Confédération de la production et du commerce du Chili, et Siobhan Vipond , vice-présidente, Congrès du travail du Canada

La Vice-Présidente de la Confédération syndicale internationale, Mme Siobhan Vipond, qui est Vice-Présidente du Congrès du travail du Canada, a appelé à investir dans l’économie des soins, « un domaine clef pour accélérer les progrès en matière de travail décent et d’égalité des sexes ». Selon elle, l’économie mondiale n’a pas encore pleinement exploité le potentiel de création d’emplois décents dans le secteur des soins. Pourtant, des investissements publics supplémentaires de 1% du PIB dans l’économie des soins sur cinq ans entraîneraient une augmentation moyenne du PIB de plus de 11%, ainsi qu’une augmentation de 6,3% du niveau total d’emploi, a-t-elle fait valoir.

Elle a ajouté que les politiques de salaire décent doivent aller de pair avec l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale, afin de lutter contre la féminisation de la pauvreté. Selon l’activiste des droits des travailleurs, toutes ces politiques ne seront efficaces pour l’ODD 8 que si elles s’inscrivent dans une réforme structurelle plus large, celle de l’architecture financière mondiale. Elle a expliqué en effet que les pays en développement ne disposent pas, à l’heure actuelle, de la marge de manœuvre budgétaire nécessaire pour investir dans les ODD.

La Directrice générale de la Confédération de la production et du commerce du Chili, Mme Macarena Letelier, a estimé que dans sa région, l’urgence est de passer de l’informalité à la formalité. Comment y parvenir? La formation technologique peut être un formidable catalyseur de formalisation, a-t-elle argué. Elle a également appelé à des modèles de financement qui récompensent la création d’emplois formels et encouragent les pratiques de travail décentes, en particulier pour les jeunes et les femmes.

Des jeunes qui sont des véritables laissés pour compte dans les programmes gouvernementaux relatifs au travail, a déploré une organisation de la société civile représentant les groupes discriminés dans le monde du travail. Conscient de l’importance de la question, le grand groupe des enfants et des jeunes a préconisé l’organisation d’un forum des Nations Unies sur « la question des 270 millions de personnes discriminées sur leur lieu de travail ». Il est question de bâtir des économies qui ne laissent personne de côté, a appuyé la Tchéquie.

Le Bangladesh envisage également de ne pas laisser à la traîne les 80% de sa main d’œuvre qui appartient au secteur informel, a assuré la délégation en expliquant que sa priorité est de renforcer la protection sociale. Un objectif qui a motivé les Philippines à insister sur la formation et l’apprentissage tout au long de la vie par les systèmes de stage. La Colombie a, elle, attiré l’attention sur le besoin de politiques porteuses de transformation. Une nouvelle législation colombienne accorde justement plus de droits aux travailleurs, notamment les jeunes. L’Ordre souverain de Malte a conclu en rappelant que le travail n’a pas seulement pour objectif une production économique, mais qu’il est également une source de dignité humaine.

Petits États insulaires en développement (PIED) : stratégies pour la réussite des ODD

Maritza Chan , vice-présidente, ECOSOC
Maritza Chan Valverde , vice-présidente, ECOSOC - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3119

Maritza Chan , vice-présidente, ECOSOC

Dans son discours d’ouverture de cette deuxième table ronde de la journée, Mme Maritza Chan Valverde, Vice-Présidente de l’ECOSOC, n’a pas manqué d’évoquer le Programme d’Antigua et-Barbuda pour les petits États insulaires en développement (PEID), qui définit leur feuille de route pour la prochaine décennie afin de se préparer à l’inéluctable.

Jeem Lippwe , Représentant permanent des États fédérés de Micronésie auprès de l'ONU, au nom des PEID du Pacifique
Jeem Lippwe , Représentant permanent des États fédérés de Micronésie auprès de l'ONU, au nom des PEID du Pacifique - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3111

Jeem Lippwe , Représentant permanent des États fédérés de Micronésie auprès de l’ONU, au nom des PEID du Pacifique

Car au-delà de la réalisation compromise des ODD d’ici à 2030, les PEID sont directement menacés par le recul du trait de côte. Leur disparition, a rappelé l’Ordre souverain de Malte, n’est pas une hypothèse, mais une réalité : « les rivages reculent. Les maisons disparaissent. Les statuts juridiques vacillent ». Au nom des 12 PEID du Pacifique, les États fédérés de Micronésie se sont alarmés de la situation. Seulement 35% des cibles des ODD sont actuellement en bonne voie chez eux ; 18% sont en régression. Les dernières données de l’ONU indiquent que les PEID du Pacifique sont tellement en retard qu’au rythme actuel, ils devraient atteindre les cibles d’ici seulement à 2065, soit 35 ans après la date butoir du Programme 2030. « Une trajectoire profondément préoccupante », ont-ils redouté.

Ilena Seid , Représentante permanente des Palaos auprès de l'ONU et Présidente de l'Alliance des petits États insulaires (AOSIS) et Navid Hanif , Sous-Secrétaire général chargé du développement économique, DAES de l'ONU
Ilena Seid , Représentante permanente des Palaos auprès de l'ONU et Présidente de l'Alliance des petits États insulaires (AOSIS) et Navid Hanif , Sous-Secrétaire général chargé du développement économique, DAES de l'ONU - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3117

Ilena Seid , Représentante permanente des Palaos auprès de l’ONU et Présidente de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) et Navid Hanif , Sous-Secrétaire général chargé du développement économique, DAES de l’ONU

Face au double recul des ODD et du trait de côte, le Programme d’Antigua-et-Barbuda présente des actions concrètes dans 10 domaines thématiques « à mettre en œuvre dès maintenant », a rappelé M. Navid Hanif, le Sous-Secrétaire général au développement économique au Département des affaires économiques et sociales (DESA). Il a préconisé de « proposer des échanges de dettes », de « donner une marge de manœuvre budgétaire », et « d’accroître le ratio impôts-PIB ».

« Le temps joue contre nous. À seulement cinq ans de la réalisation des ODD, nos populations ont besoin de solutions urgentes et concrètes. Cela inclut un accès équitable au financement, un allègement de la dette et des partenariats qui tiennent compte de nos réelles vulnérabilités et de nos besoins de développement », a confirmé le Suriname.

Le déficit de financement des ODD de 4 000 milliards de dollars, reconnu dans la quatrième Conférence internationale sur le financement du développement de Séville, souligne l’urgence de catalyser les investissements à grande échelle, de s’attaquer à la crise de la dette et du développement, et de réformer l’architecture financière internationale afin de mieux répondre aux défis changeants des PEID, a souligné le groupe des PEID du Pacifique, par le truchement des États fédérés de Micronésie. À Séville, l’Union européenne (UE) s’est justement engagée à progresser pour la prise en compte de l’indice de vulnérabilité et de résilience multidimensionnelles, une mesure réclamée de longue date par les PEID. Elle s’est aussi engagée à défendre les réformes en cours de l’architecture financière internationale, en vue d’inclure davantage les pays en développement au sein des banques multilatérales de développement et d’autres institutions économiques et financières internationales.

Si Séville marque une étape clef de la Feuille de route de Bakou à Belém, visant à atteindre 1 300 milliards de dollars de financement, en promouvant des solutions de financement intégrées et pilotées par les pays pour le climat et le développement, le groupe des PEID estime cependant que l’une des opportunités les plus concrètes pour élargir l’accès aux subventions et aux financements concessionnels réside dans la réaffectation des droits de tirage spéciaux (DTS). Cette approche est fiscalement neutre pour les pays donateurs. Un point crucial, dans le contexte actuel d’incertitudes géopolitiques et de pressions budgétaires.

Le succès du Programme d’Antigua-et-Barbuda « dépendra de notre capacité à aligner nos stratégies nationales sur ses piliers fondamentaux : résilience, inclusion et innovation », a estimé M. Ulisses Correia e Silva, Premier Ministre de Cabo Verde, dans un message transmis au forum. À Cabo Verde, les engagements sont intégrés au plan national de développement. L’accent est mis sur « la gouvernance durable des océans, la transformation numérique et les voies de l’économie bleue et verte ». Le système des Nations Unies doit également être prêt à soutenir le Programme en lui fournissant les modalités de travail, les outils, l’expertise et les ressources appropriés afin de mieux soutenir les priorités nationales tout en agissant de manière cohérente et coordonnée, a prié le Premier Ministre.

Tania Romualdo , Représentante permanente plénipotentiaire de Cabo Verde auprès de l'ONU
Tania Romualdo , Représentante permanente plénipotentiaire de Cabo Verde auprès de l'ONU - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3110

Tania Romualdo , Représentante permanente plénipotentiaire de Cabo Verde auprès de l’ONU

La session a aussi été l’occasion d’examiner les premiers efforts visant à soutenir la mise en œuvre effective du Programme, adopté en 2024, notamment son suivi et son évaluation par la collecte de données.

Des données fiables sont en effet essentielles pour être sûr d’adopter des pratiques efficaces. « Il est impossible de gérer ce que l’on ne peut pas mesurer », a confirmé le Suriname, en appelant à combler les lacunes persistantes en matière de données ainsi qu’à investir dans des systèmes statistiques nationaux plus solides.

Un autre témoignage de vulnérabilité est venu des Bahamas qui continuent de faire face à des vulnérabilités structurelles profondément ancrées : leur situation géographique, dans la ceinture des ouragans de l’Atlantique, les expose à des chocs climatiques persistants et de plus en plus intenses. Le troisième examen volontaire national du pays à l’occasion du forum politique montre que l’ouragan Dorian et la pandémie de COVID-19 l’ont durement mis à l’épreuve, mais il décrit aussi les réussites, les enseignements tirés de ces catastrophes ainsi que les meilleures pratiques émergentes.

Des solutions locales ont été exposées cet après-midi, s’agissant de la transition énergétique, le respect de l’environnement et l’adaptation aux changements climatiques des PEID. Dans une vidéo produite et diffusée par Sainte-Lucie, une de ses habitantes, Anne Marie Benoit, témoigne avoir opté pour la culture végétale en hydroponie. Avec les changements climatiques, les précipitations diminuent, a-t-elle dit en expliquant qu’elle est obligée d’utiliser l’eau plus efficacement. « Mon système fonctionne en circuit fermé, l’eau est recyclée et changée tous les deux mois. De ce fait, on économise l’eau, on ne nuit pas à l’environnement. L’eau ne contient aucun produit chimique, les micro-organismes du sol ne sont pas affectés et les eaux de ruissellement n’affectent pas la vie marine. »

Un autre Saint-lucien, Vincent Jeg Clarke, a expliqué s’être lancé dans l’apiculture dans le cadre de la diversification et de l’exploitation durable de la mangrove de Makote. « Nous transitionnons de la production de charbon de bois à celle du miel et de la mousse de mer. Cette dernière nous permet de créer une ferme pour alevins et crustacés. Les pêcheurs en profitent et nous limitons la quantité de carbone relâchée dans l’atmosphère. »

À Cabo Verde, on teste des solutions numériques pour étendre les soins de santé aux îles isolées, on investit dans le dessalement alimenté par les énergies renouvelables et on promeut une « agriculture intelligente » pour renforcer la sécurité alimentaire, a encore témoigné ce pays.

« Aucun PEID ne peut s’en sortir seul », a lancé le Premier Ministre caboverdien, soulignant la nécessité de coopération entre pays. Malgré la distance géographique, la Thaïlande promeut justement la coopération au développement dans les PEID. En partenariat avec le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA) et le Timor-Leste, elle a mené à bien un projet de développement triangulaire en matière de santé maternelle et reproductive. Le partenariat a renforcé les capacités de santé publique du Timor-Leste et a ainsi contribué à l’ODD 3 (bonne santé et bien-être). La Thaïlande invite en outre les PEID à un cours de formation et un programme de troisième cycle sur l’atténuation et l’adaptation aux changements climatiques, l’écotourisme et le développement communautaire, auxquels les Fidji et la Papouasie-Nouvelle-Guinée participent déjà sur une base annuelle.

Vanessa Frazier , Représentante permanente de Malte auprès des Nations Unies
Vanessa Frazier , Représentante permanente de Malte auprès des Nations Unies - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3109

Vanessa Frazier , Représentante permanente de Malte auprès des Nations Unies

Les PEID sont bel et bien menacés de disparition. Mais ce qui ne peut disparaître, a insisté l’Ordre souverain de Malte, « c’est leur identité, leur sens des responsabilités et leur dignité ». Ces valeurs, a-t-il noté, ne sont pas ancrées dans le sol, mais dans la volonté d’un peuple de perdurer et d’affirmer son droit à exister en tant que communautés autonomes.

Ruth Julie Kissam , Réseau des femmes leaders de Papouasie-Nouvelle-Guinée
Ruth Julie Kissam , Réseau des femmes leaders de Papouasie-Nouvelle-Guinée - Crédits : Kiara Worth-IISD Agrandir la figure 3116

Ruth Julie Kissam , Réseau des femmes leaders de Papouasie-Nouvelle-Guinée

En écho Mme Ruth Julie Kissam, du réseau de femmes patronnes de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, seule représentante des peuples autochtones parmi les intervenants, a eu ce dernier mot sous les applaudissements de l’assemblée. « Nous n’avons pas hérité de notre terre ; nous l’avons empruntée à nos enfants. »

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Figure 3112

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